Le Donjon du Dragon

Faction War (page 28)

Premièrement, personne n'appelle ça les souterrains de Sigil, c'est un terme de Primaire. Les gens s'y réfèrent simplement comme le "dessous", "les catacombes", "le Royaume du Dessous" ou encore "les labyrinthes" (mais jamais les Dédales - ça c'est autre chose, bige). Bien sûr, l'existence des souterrains de Sigil soulève la question : de quoi Sigil est faite pour que les biges puissent y creuser ? Et bien, certaines barbes grises ont (sérieusement) dévoué leur vie en quête de cette question, et voilà ce qui en ressort : Personne ne sait.

N'importe quel nain pourra vous dire que ce n'est pas de la pierre. Ça ressemble toutefois un peu à de la pierre, et c'est à peu près aussi dur. Mais bien qu'un lascar ait besoin d'une pioche, d'une pelle et d'un bon dos pour y tailler sa route, le matériau, à la différence des pierres, n'est pas fait pour bâtir, façonner ou quoique ce soit d'autre. Une fois taillée et enlevée de son bloc d'origine, la pierre devient friable et cassante comme un morceau de gâteau de riz tout sec.
C'est pourquoi les gens doivent importer la pierre, le bois et autres matériaux via des portails pour bâtir quoique ce soit dans Sigil. Quelque soit la matière dont le tore est composé, elle ne sert à rien si ce n'est à faire de la poussière.

Aussi, lorsque les gens se réfèrent aux rues cradingues d'un district particulier ou aux ordures sur leurs bottes lorsqu'ils arpentent la Ruche, ils parlent de la poussière qui entre par les portails constamment ouverts, des détritus de bâtiments depuis longtemps effondrés, et des immondices des personnes qui ont vécu à Sigil depuis nul ne le sait.
La Cage n'est pas faite de terre, plantez y un arbre et vous verrez comment il pousse. Ou pas à moins que de la terre ne soit importée à grands frais.

Quoi qu'il en soit, les catacombes labyrinthiques qui courent sous les rues et les bâtiments de la Cité des Portes fournissent aux Cageurs un mystère sans fin à discuter autour d'un repas ou d'une chope de bière.
En fait, certains lascars pensent qu'il n'y a pas de Catacombes du tout. Ca ne se peut pas, disent-ils, parce que pour eux il n'y a pas de "bas".
Ces gens croient que les entrées des catacombes sont en fait des portails sans clés et que les tunnels et les salles se trouvent en réalité sur un quelconque autre Plan - un peu comme les Demi-Plans où la Dame construit ses Dédales.
Pour corroborer cette théorie, ces commères prétendent qu'à chaque fois qu'un péquin a creusé vraiment profond, au lieu d'atteindre l'extérieur de l'anneau de Sigil, il disparaît tout simplement.
Ce qui est sûr, c'est que ça semble être le cas. Personne n'a jamais créé de tunnel tout le long jusqu'à l'extérieur - et personne n'y est même presque arrivé.

En fait, posez la question à une barbe grise et il ne pourra même pas vous dire quelle est exactement l'épaisseur du tore, en tout cas pas sans avoir un brin de doute.
Personne ne connaît ce simple fait, bien que cela semble une question assez facile. (Pour un endroit habité depuis des millénaires, Sigil possède encore un nombre incroyable de mystères).

La plupart des gens ne croient pas entièrement à la théorie des autres Plans dans les Catacombes. Puisque ça paraît simple, disent-ils, ne venez pas embrouiller les choses.
A Sigil de même que sur les Plans, lorsqu'une chose ne nécessite pas de théorie étrange, n'essayez pas de lui en donner une.
Mais si il en est ainsi, et que les tunnels et les passages ne sont rien de plus que ce qu'ils paraissent, alors où se rendent les dabus exactement, et pourquoi un matois ne peut-il pas les suivre ?

L'histoire de Rhemmy "Va-chercher"

Pour une pauvre bibe un peu fraîche, Rhemmy "Va-chercher" vous racontera ses excursions sous les rues de Sigil. Les matois avisés savent qu'il ne faut pas croire tout ce qu'il dit, mais à mesure qu'il branle son râtelier encore et encore, le péquin commencera à se faire une idée de ce qu'il y a en dessous de ses pieds. Il y a une Sigil que personne ne connaît et que personne ne voit - une ville cachée sous la Cité au Centre de Tout.

"V'nez, approchez. Soyez pas timide" vous lance Rhemmy, avec son haleine fétide qui empeste la bibe, tout en étreignant tout ceux qui l'écoutent. "Certains vous diront que j'suis rien d'aut' qu'un baratineur. Mais aujourd'hui - pas plus tard hein, juste aujourd'hui - j'vais vous dire la vraie chanson. La vraie histoire des aventures d'Rhemmy dans le Royaume du Dessous.

C'est plus que vrai. J'ai jamais trop joué de l'épée. Non. C'pas trop ma spécialité. Pas trop mon genre. Ils m'appellent "Va-chercher", et c'est parce que j'vais chercher des choses pour les gens. Vous dites à Rhemmy c'qu'vous voulez, et j'vais vous'l chercher. V'Voyez ? Z'avez pigé ?
En tout cas, un jour, y a un bige qui m'dit qu'il a quelqu'chose pour moi à aller lui chercher. C'est tombé dans un trou qui m'dit. L'une de ces bouches d'égouts dans la rue - tu vois. Enfin moi je l'savais. Et c'était pas juste un quelconque vieux machin. Ce bige voulait qu'j'aille lui chercher un truc magique… heu comment dire… un bâton. C'était tombé dans les égouts pendant qu'il s'bagarrait avec quelqu'un."
Rhemmy empoigna le verre en face de lui et le vida, tout en me regardant. Et tandis que j'en commandais un autre au tavernier, il continua.

"J'ai quand même trouvé un passage en dessous, sous la rue. C'était assez loin de là où l'bâton était tombé, alors j'ai du errer pas mal pour trouver un moyen d'y parvenir. Bah. Une vraie puanteur. Y avait des rats aussi ! Y'en avait un paquet - mais j'avais une lanterne sur moi et une bonne lame robuste, alors j'étais pas trop inquiet. La plupart des bestioles ont décampé.

Maintenant, chui un bon chercheur. J'vous l'dis d'emblée, pour que personne ne s'fasse de fausses idées. Mais j'avais pas non plus beaucoup d'expérience pour traîner dans les tunnels sombres. J'me suis laissé dire qu'y a des lascars dans l'Plan Primaire qui font ça tout l'temps, mais pas ici dans la Cage, hein ? Alors j'ai pas honte de dire qu'j'ai pas mal galéré. J'ai finit par m'enfoncer très profondément, pensant qu'ces tunnels allaient bien finir par m'faire remonter à un moment donné. A la longue, y avait plus d'huile dans ma lanterne, et j'me suis r'trouvé là, nul ne sait où, dans l'noir !"

Rhemmy continua pendant un certain temps à me raconter les horreurs que c'est de se retrouver seul dans l'obscurité. Oui, c'est vrai, tous ceux qui ont été dans le Pandémonium savent ce que sont vraiment les ténèbres et l'horreur. Finalement, il arrêta de divaguer.

"Y avait des choses en bas, tu vois ? Des monstres dont j'avais jamais entendu parler avant et même maint'nant, avec des bouches, des bras et des tentacules recouvertes de merde d'égout. Des petites choses couraient à toute vitesse dans les tunnels et pis dans mon esprit. J'ai cru que j'dev'nais azimuté. C'pendant, là où c'était plus sec, y avait des gens qui vivaient. Ils s'appelaient eux-mêmes les Obscurs et ils vivaient sans lumière. Certains étaient des voleurs et des meurtriers, mais d'aut' étaient comme y faut. Ils ont aidé Rhemmy à r'trouver la sortie - ça faisait trois jours que j'étais là-dessous, et j't'assure que quand chui r'ssorti, j'étais dans un quartier totalement différent de quand j'suis entré.
J'ai jamais r'trouvé ce truc magique.

Alors maint'nant n'allez pas penser du mal de Rhemmy, parc'que c'est la seule chose que j'ai jamais été capable de r'trouver.
Donc si vous z'avez un truc que vous voulez qu'j'aille chercher…"

Ayant entendu tout ce que je pouvais sur Rhemmy, je sortis de la taverne. Mais malgré tout, je ne peux m'empêcher de regarder par terre, et me demander ce qui peut bien reposer sous mes pieds.

- Faragoh Naeil, narrateur

Les tunnels des dabus

Quand les gens se réfèrent aux Tunnels des Dabus, ils parlent des endroits mystérieux où les dabus se rendent sous les rues de Sigil, et pas simplement les tunnels qu'ils empruntent pour aller là bas. La distinction est importante, parce qu'un péquin peut très bien descendre dans les tunnels. Il peut rejoindre la plupart des zones connues qui se trouvent en dessous. Mais personne ne peut suivre les dabus jusque dans leurs cases.

Leurs petits refuges, cathédrales, places, ou quoi que soit d'autres, sont inaccessibles aux non dabus - si jamais ils existent. La plupart des gens supposent que les dabus vivent quelque part. Ils disparaissent certainement en s'enfonçant dans les tunnels une fois qu'ils ont fini leur travail, et un péquin pourrait supposer qu'ils rejoignent leur foyer, ou qu'ils retournent à leur quartier général, ou leur base, ou quoi que ce soit qu'ils puissent avoir. Et d'ailleurs, s'ils ne se rendaient pas dans des endroits secrets, pourquoi ne laisseraient-ils pas les gens les suivre ?

Bien sûr, comme toujours, les gens ont des théories différentes. Comme dit précédemment, les Cageurs aiment blablater sur le Royaume du Dessous, alors il y a pas mal de chansons (et de foutaises) qu'on peut entendre à ce sujet. Peut-être que les dabus disparaissent à travers des portails cachés dans les catacombes qui mènent à leurs foyers situés sur un autre Plan. Peut-être qu'ils protègent leurs tunnels avec une puissante magie, afin qu'eux seuls puissent trouver leur chemin. Ou peut-être qu'ils s'enfoncent dans les Catacombes jusqu'au sanctuaire secret de la Dame elle-même, et que c'est sa volonté qui tient les autres biges à l'écart.

Les soltifs de ces lascars ne sont que des spéculations. Il est vrai cependant que ceux qui explorent les tunnels sous la ville tombent souvent sur un dabus en train de remonter ou de descendre. Les suivre n'a jamais rien donné, mais c'est sûr que pas mal de péquins y ont songé.

Parcourir les souterrains

Maintenant, si les gens veulent aller dans le Royaume du Dessous, c'est leur problème. Certains lascars aiment fouiller les endroits étranges, tandis que d'autres peuvent y être forcés par les circonstances (si la proie d'un Rectifieur se rend en dessous par exemple, et que le matois est censé la suivre).

La première chose que dois faire un lascar pour explorer les catacombes de Sigil, c'est de savoir comment s'y rendre. En fait, ça n'est pas si difficile. Il y a plus d'entrées qu'un péquin ne pourrait le croire. Le moyen le plus facile d'y entrer, même si ça n'est pas le plus agréable, c'est de passer par les égouts. Les explorateurs prêts à patauger dans les ordures et la flotte dégueulasse n'auront pas à vagabonder trop longtemps (quelques heures sont généralement suffisantes) avant de tomber sur un mystérieux passage ou même une porte qui mène aux tunnels d'évacuation puis dans les labyrinthes. En général, ces passages descendent assez rapidement - ce qui indique au péquin qu'il est en train d'entrer dans les catacombes.